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mardi 12 juin 2007

Les Malheurs de l'Entreprise



Les récents drames dans l'industrie automobile française (plusieurs suicides de cadres en quelques semaines) mettent à nouveau à jour la pression sous laquelle travaillent nos concitoyens.

Si effectivement la situation est grave, je ne partage pas l'alarmisme délirant de ce Rebond dans libé (notez la grande sagesse des 2 premiers commentaires - quel discernement !).

Le remarquable ouvrage de Thomas Philippon que j'ai déjà évoqué ici avance de brillantes théories sur notre grande difficulté à travailler ensemble, que ce soit dans le privé ou le public d'ailleurs. Entre parenthèses, il s'agit d'un des grands regrets de Mitterand que de ne pas avoir pu/su fluidifier et harmoniser ces relations.

Ce que j'ai pour ma part remarqué c'est qu'il est aussi très pénible de travailler en France pour deux raisons principales : a) un grand investissement affectif et donc un manque de distanciation et b) une culture du conflit.

Mon travail, mon enfant

On ne sait pas, comme les anglo saxons par exemple, avoir le recul necessaire pour faire la différence entre ce que nous produisons et ce que nous sommes. Ainsi la critique est-elle très mal prise car on se sent critiqué personnellement alors qu'en fait on critique le produit avec pour objectif que celui-ci soit le meilleur au final.

Il est très difficile d'admettre que ce qui importe ce n'est pas de mettre en oeuvre sa propre idée mais de mettre en oeuvre la meilleure idée pour le projet.

Le coup de gueule comme affirmation de soi

Une autre chose terriblement épuisante dans les relations professionnelles en France est cette culture du conflit, avec le coup de gueule comme vecteur d'affirmation de la personnalité. Alors que dans les cultures protestantes il s'agit là d'une attitude hors de propos et égocentrique.

Le latin identifiera cette reticence à gueuler comme de la lâche soumission alors que pour les protestants il ne s'agit là que d'accepter l'interêt général : ne pas casser les oreilles, épargner aux collégues des débordements impudiques et se maintenir dans un échange constructif.

L'art et l'avant garde du capitalisme

Enfin, ce que trouve particulièrement ironique c'est que les plus grands détracteurs de la vie en entreprise viennent du monde du journalisme ou du milieu artistique.

Tout le monde sait qu'il s'agit là de deux milieux de franche camaraderie et de grande convivialité. Cette hypocrisie prend une autre dimension lorsque l'on lit Pierre Michel Menger (Portrait de l'artiste en travailleur) peignant le monde artistique comme l'une des formes les plus abouties du nouveau capitalisme (winner takes all etc ...).

Et si nous essayions plutôt de trouver ensemble des solutions intelligentes et pragmatiques plutôt que benoîtement tout mettre sur le dos du grand méchant capital ?

vendredi 8 juin 2007

La France et la vieille tante embarrassante


Lorsque l'on vit à l'étranger on entretient une relation particulière, bien plus intime avec sa nationalité. On se retrouve confronté à un autre mode de vie qui fait réfléchir différemment à notre idendité. Reflexion qui permet d'identifier la part de conditionnement culturel lié à notre nationalité.

Aussi, on se retrouve dans la peau d'un micro-ambassadeur et on représente sa patrie : ça c'est un grand honneur. Honneur qui implique aussi de devoir répondre des actes de son pays. Et là on se retrouve parfois dans une situation embarrassante, un peu comme lorsque l'on reçoit des amis et que sa vieille tante impudique se donne en spectacle sans beaucoup de pudeur.

Les exemples d'attitude embarrassante et déplacée de mon pays lors de mon expatriation (1996-2004) sont innombrables :
  • la reprise des essais nucléaires par Chirac en 96,
  • notre critique ouverte de la démocratie en Autriche lors de l'avènement de Jorg Haider en 2000, conseils démocratiques qui feront hurler de rire des collègues Autrichiens au Printemps 2002
  • notre ingérence dans les choix politiques des autres pays comme la Pologne lors de leur choix de suivre les US pour la guerre en Irak,
  • notre critique ouverte des systèmes de santé des pays anglo-saxons en chantant partout l'exemplarité du nôtre, pour voir le drame national de l'été 2003
  • ce chanteur, ardent défenseur des libertés et des opprimés, interpelant le libéralisme et le capital malfaisant (incarnés alors par JM Messier) lors d'une cérémonie quelconque pour lui rappeler que "nos vies valent mieux que leur profit", sous les vivas de la salle enthousiaste, dans un souffle révolutionnaire. Ce même chanteur qui battra à mort sa compagne quelques mois plus tard.
  • Le rejet républicain de toute discrimination positive et l'hypocrisie sur la représentation des minorités dans la vie publique, ou plutôt ce manque ahurissant de représentation, tel que me le faisait remarquer un ami anglais d'origine Jamaïcaine en 2003
Cette vieille tante embarrassante est réapparue lors du festival de Cannes. Jamel (un des seuls comiques.fr à me faire régulièrement beaucoup rire) n'a pu s'abstenir de faire une lourde allusion à la politique durant son discours.

J'ai trouvé cela complètement hors-propos et inapproprié. J'ai pensé alors à toutes ces délégations, ces artistes venus des quatre coins du monde, regardant, gênés cette vieille tante sortir le linge sale devant tous ces étrangers, cela m'a un peu embarrassé et j'ai ressenti ce même sentiment confus de gêne et de colère à l'égard de mon pays.

Vas-y tatie, fais un peu preuve de dignité et apprends à te taire.

vendredi 25 mai 2007

Le Capitalisme des héritiers





Philippon Vs Droite/Gauche


Je travaille dans l'industrie informatique depuis 19 ans dont 3 ans passés au Royaume Uni et 5 en Suisse Alémanique. Les différentes approches du travail constituent un sujet fascinant, qui m'interpellent profondément et me questionnent.

J'ai entendu Thomas Philippon l'autre jour sur France Inter où il présentait son livre : le capitalisme des héritiers (une synthèse rapide ici). Fred Bonnaud, ne sait trop comment s'y prendre : le chef de bande se fige alors dans sa grille de lecture antédiluvienne : "mais on a du mal a savoir s'il s'agit d'un livre de gauche ou de droite".

Ce manichéïsme de la pensée est désespérant et merveilleusement bien partagé dans notre pays. C'est le coeur même du bouquin de Philippon. La coopération se fait dans la douleur, bloc contre bloc, dans une méfiance permanente, quand elle devrait être dans un élan collectif.

Les conclusions d'analyses croisées de Philippon sont : «statistiquement, la qualité des relations sociales dans l’entreprise explique 70% des variations de taux d’emploi entre les pays (…). C’est deux fois mieux qu’avec les variables institutionnelles classiques (taux de remplacement et durée des allocations chômage, taux d’imposition du travail, coûts de licenciements, etc.)»

Nous sommes passionnés, nous sommes épuisés

Mon sentiment, nourri par ces années d'experience, est qu'il est plus éprouvant et difficile de travailler dans l'industrie Française en raison de ces relations conflictuelles entre les employés et le management ou entre les syndicats et les patrons.

Ce que tend à prouver ce livre qui offre un éclairage neuf et vif sur des notions que je ressentais confusément sans être vraiment capable de les enoncer clairement.

Ce, tout en rajoutant qu'il s'agit là, chiffres à l'appui, d'une des causes plausibles du manque de dynamisme de notre marché de l'emploi. Une théorie particulièrement interessante.